« La jalousie est un monstre qui s'engendre lui-même et naît de ses propres entrailles. » W. Shakespeare.
Part one ♬ And we will never be alone again.
« Vous savez, ma femme et moi n'avons jamais préféré l'une ou l'autre de nos filles... De nos jumelles. Ma femme a fait des erreurs, certes. Mais pas celle-là.
Si notre attention s'est portée davantage sur Pomelyn, ce n'est qu'en raison de ses soucis de santé d'antan. Pour Jazzélys, nous avions un avenir tout tracé : nous la voyions dans la musique... Nous espérions qu'elle embrasserait une telle carrière. Et c'est ce qu'elle a fait de son plein gré. Nous n'aurions jamais pu imaginer ce qui allait suivre. Jazzy était une petite fille pétillante, une petite fille en or mais qui souffrait de notre absence. Nous étions trop absorbés par l'état de sa sœur... Mais qui pourrait nous en blâmer ? Nous aimions nos enfants plus que tout au monde. Elles étaient aussi importantes l'une que l'autre, mais Jazzy, elle, ne risquait pas sa vie.
Nous n'avons comprit nos erreurs que bien plus tard.
Bien entendu, la trahison de ma femme n'a rien arrangé dans nos rapports. Je ne dirais pas que je m'entends mal avec Jazzy... Je l'aime telle qu'elle est, évidemment. Mais elle ressent toujours une pointe de rancoeur envers moi, d'autant plus depuis que ma femme a été arrêtée et condamnée. Elle m'a déjà avoué qu'elle m'en voulait de n'avoir pas su faire taire sa mère... De ne pas l'avoir dissuadé de ses actes. Jazzélys estime la famille brisée. Si nous ne sommes pas soudés, nous ne sommes pas pour autant brisés. Pommy et Jazzy sont très proches... Et Pomelyn traîne toujours dans les pattes de Kayle. Nous faisons face aux intempéries en famille.
Je pense que Jazzélys a fini par comprendre pourquoi son frère a décidé de condamner leur mère. C'est ce que nous voulions tous, lorsque l'on a apprit son arrestation. Nous ne comprenons pas ses motivations... Et nous ne la soutenons absolument pas dans sa démarche. Néanmoins, Jazzélys demeure inconsolable à son sujet...
Mais j'aime mes enfants plus que tout, et si nous passons assez peu de temps ensemble, ce n'est pas de mon ressort. Je les prie souvent de venir me voir... Je suis juste un père décontenancé par la tournure qu'ont prit les évènements, et par la tournure qu'ont prit les vies de mes enfants. Enfin ! Maintenant, Jazzélys est heureuse dans ce qu'elle fait, tout comme Pomelyn et Kayle, et j'en suis heureux. Elle mérite l'attention du Capitole, car ses œuvres sont magnifiques... Je regrette juste qu'elle n'ait pas continué dans la musique. J'adore sa voix, et elle le sait... Alors, parfois, elle me chantonne quelque chose, lorsqu'elle vient me voir. »
Le père de Jazzélys.Part two ♬ I'm so tired of turning and running away...
« Le Capitole était accroché à ses lèvres, à une époque... Lorsqu'elle était encore dans la musique. C'est un grand drame pour ma boîte et moi-même d'avoir perdu Jazzélys. Sa voix cristalline enchantait tout un chacun et embaumait les cœurs. Je ne me lassais pas de l'entendre, et chaque nouvel album était accueilli avec un grand triomphe.
Nous n'avons rien vu venir. Nous la pensions heureuse, et à raison : un sourire toujours aux lèvres, une carrière florissante et un compte en banque bien rempli... Qui pourrait s'en plaindre ?
A une époque, l'on disait même qu'elle enchaînait les conquêtes. Certes, parfois la célébrité est étouffante... Et peut-être que c'est ce qui l'a poussé dans ses derniers retranchements. Peut-être qu'elle en a eu assez d'être espionnée tout le temps et de ne jamais pouvoir être réellement seule... D'écumer les émissions de télé où on l'interviewait.
Je ne sais pas... D'autant que souvent, les émissions étaient agréables et drôles : il n'était pas rare que Jazzélys se retrouve face à face avec sa sœur, qui lui posait des questions dont elle connaissait déjà les réponses. Et les télé-spectateurs adoraient ça... Avoir la même personne deux fois. C'était déconcertant de les voir se parler, alors que nous nous perdions à savoir qui était qui.
Et puis, les habitants du Capitole ont adorée la voir changer. Elle a commencé très jeune, à ses dix ans je crois ? Je ne me souviens plus très bien. Alors voir les changements de sa voix, ses changements physiques et pouvoir suivre ses amourettes d'adolescente, c'était rafraîchissant.
Jazzélys sait néanmoins que si un jour elle veut revenir dans la musique, la porte lui sera toujours ouverte. Nous adorions son tempérament et sa joie de vivre, sa façon d'être toujours optimiste et utopiste. Nous aimions aussi, vous vous en doutez, son succès qui rapportait énormément à la chaîne. Tout le Capitole la regrette, mais personne n'oserait le formuler... Pas après la honte qui pèse sur elle. Pas après ce qu'elle a osé faire, et qui a été relaté dans les journaux locaux. Elle a l'air de n'en avoir rien à faire, mais je pense que ça la blesse. Et elle sait qu'elle peut toujours compter sur moi... C'est une fille géniale. Un peu trop accro aux sucreries et aux peluches, mais géniale. »
Le Producteur de Jazz.Part three ♬ Can't you see I'm hangin’ by a thread ?
« Elle a débarqué comme ça, un jour... Je n'ai jamais réussi à lui soutirer de quel quartier elle provenait, ni réellement son nom. Elle m'a dit s’appeler Eve, mais je n'y croyais rien... Et puis, sa tête me disait quelque chose... Je me suis longtemps demandé s'il s'agissait réellement de la présentatrice télé ou non... Mais Eve était là alors que l'autre passait. Il faudrait être réellement idiot pour ne pas se douter qu'elles sont sœurs, et jumelles de surcroît. Je sais donc que son nom est Briar, mais à part ça...
Dans tous les cas, je m'en fichais et ça ne me concernait pas. Elle ne voulait pas qu'on la reconnaisse, et elle n'était pas la seule qui me demandait cette condition en échange d'un travail pour moi. Pour devenir l'une de mes filles...
Avec un minois comme le sien, il aurait fallu être fou de toute façon pour refuser... Et puis, vous l'auriez vu, en ce soir pluvieux... Elle avait l'air désespérée, et elle grelottait de froid avec les bras nus. Son maquillage coulait, et elle m'a presque supplié de la laisser entrer. Je ne suis pas sûre qu'elle ait comprit tout de suite où elle se trouvait. Elle analysait les lieux, regardait les filles - fortement dénudées - passer avec un air clair d'incompréhension et de fascination mêlée.
Elle m'a demandé ce que nous offrions ici. Je lui ai répondu avec sincérité, et si elle a rougit et a paru choqué pendant quelques secondes, elle n'a pas hésité davantage. Elle m'a demandé un emploi, en me regardant dans le blanc des yeux et avec une détermination infinie... Ainsi qu'un petit air espiègle. Je ne prends pas de débutantes, c'est ce que j'aurais dit d'habitude... Mais elle avait l'air de tellement y tenir que je me suis dit, pourquoi pas. Et je n'ai pas été déçue : Si elle n'était pas très causante et préférait se reclure seule une fois la journée terminée, les clients l'adoraient autant pour sa conversation que pour ses jambes galbées et ses petits seins.
Je me suis attachée à elle... Et j'ai été, je l'avoue, assez triste de la voir nous quitter au bout de quelques mois. D'autant que la maison ne s'était jamais aussi bien portée. Les clients appréciaient beaucoup qu'elle leur résiste un peu et son petit air à la fois revêche et innocent. Je n'ai jamais eu de nouvelles d'elle depuis qu'elle est partie en me donnant sa lettre de démission, mais elle sait que la porte lui sera toujours ouverte... En tant que prostituée ou en tant que cliente. »
Directrice de La Maison Deliciae.Part four ♬ I thought of everything I'd never regret.
« Je vais être honnête... J'ai honte des chemins que j'ai pu emprunter. J'ai honte d'avoir tourné le dos à ma famille lors des difficultés que nous avons connu alors que nous devions rester soudés... Mais comment aurais-je pu simplement regarder mon frère en face alors qu'il venait de condamner ma maman ? Je sais que c'était la chose à faire... mais ça n'est pas moins douloureux.
J'ose quand même espérer que nos rapports s'arrangeront... De toute façon, ils ne peuvent pas demeurer aussi mauvais. La roue tourne, comme on dit !
Toujours est-il que me prostituer et souiller mon nom m'a libérée et m'a fait revoir mes priorités. Être la petite fille à papa qui fait ce que demandent ses parents sans rechigner... Ce n'est pas moi, ça. La sculpture sur métal est la meilleure chose qui me soit arrivée. J'adore toujours chanter, mais ce n'est pas ce que je veux faire pour gagner ma vie. La célébrité est pesante... Ne pas pouvoir faire un pas en dehors de chez soit sans subir la foule en chaleur... Je ne sais pas comment fait Pomelyn.
Parlons-en d'ailleurs, de Pomelyn... Je l'aime. Je l'aime énormément. Elle fait parti de moi... Mais je ne peux m'empêcher de la jalouser. Je sais que c'est mal ; elle aurait pu mourir... Je comprends l'attention qui demeure autour d'elle, et les choix que j'ai pu faire m'ont mises dans l'ombre... D'autant qu'ils auraient pu avoir un impact sur elle. Oui, mais... J'existe aussi. Ce n'est pas parce que nous avons le même visage qu'il n'y a qu'elle...
Ma vie a été exemplaire jusqu'à l'année dernière... Jusqu'à la folie de maman. Je me souviens lorsque je m'endormais dans ses bras, lorsqu'elle me caressait les cheveux ou m'emmenait encore, il y a quelques années, chercher des bonbons gélatineux que j'engouffrais par poignées entre mes lèvres... Et bientôt... Elle ne sera plus. Parce qu'ils veulent l'assassiner pour sa trahison. Personne ne mérite ça. J'aime les autres membres de ma famille, mais lorsque je suis avec eux, ça me rappelle que l'un de ses membres attend patiemment d'arriver sur le peloton d'exécution. Et ça, ça me tue à petit feu. Ca me gangrène... Et ça m'étouffe. Il n'y a plus cette insouciance que j'aimais durant les diners... Et Pomelyn est un peu tendue depuis les fiançailles de Kayle.
Mais vous savez ce qui me tue le plus ? C'est tout ça ! Ils continuent leur vie, comme si rien ne s'était produit... Alors que je retrouve ma mère dans chacune de mes oeuvres, dans chacune des paroles de mes chansons... On dirait qu'ils se fichent de la voir bientôt mourir...
Et Pom' me manque. Depuis tout ça, nous sommes beaucoup moins proches ; de ma faute, sans doute... Sûrement... Mais elle est tellement plus brillante que moi, tellement plus populaire aussi... Je me souviens, lorsque je chantais encore : nous étions les jumelles adorées, si mignonnes l'une à côté de l'autre... Et la maladie est arrivée, puis l'année dernière, j'ai enchaîné les conneries. Et les revues en ont parlé, et j'ai perdu toute crédibilité.
C'est une chose qui m'agace et que je déteste : Les autres habitants du Capitole peuvent faire ce qu'ils veulent sans que l'on n'ait rien à leur dire... Mais puisque nous sommes tous connus dans la famille Briar, les paparrazzis sont monnaie courante.
Notre vie ne nous appartient pas.
Mais je ne regrette pas les choix que j'ai fait. J'aimerais simplement pouvoir retrouver pleinement le sourire, sans qu'une douleur sourde vienne s'abattre sur mon coeur au souvenir de ce que j'ai pu perdre... »
Jazzélys elle-même.